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Farfalino
28 mai 2007

Et toi, raconte moi ton enfance

Ce texte a été écrit dans le cadre de mon activité de répondant pour enfants. Il a été largement coupé pendant la réunion de validation car jugé trop long par rapport au reste de la lettre. Le voilà dans son intégralité, j'en ai profité pour le corriger, le modifier et ajouter des détails. Tout est entièrement autobiographique et je n'ai pas tenté de combler les trous dans mes souvenirs.

"Et toi, raconte moi ton enfance"

Par quoi commencer ? Les souvenirs sont à la fois flous et nombreux. Je me souviens de bêtises, de joies, de peines, de bonnes notes, de mauvaises notes, de voyages en Italie, du bac à sable dans lequel je jouais, de ma première amoureuse, de moments de grande tension, … Une vie simple, plate sans relief, sans bouleversement majeur, sans grande tristesse non plus, où la tendresse n'était pas très présente.

Je suis né en région parisienne où j’ai vécu jusqu’à l’âge de 9 ans et demi pour arriver dans le Nord. Ma mère n’avait pas de travail fixe, mon père travaillait toute la semaine dans toute la France et en Belgique, il n’était là que le week-end qui étaient consacrés au rugby.

Je suis l'aîné d'une fratrie de deux frères et d'une sœur. Je ne me souviens pas de la naissance de mon premier frère. Je me souviens vaguement de l’arrivée de mon second frère, arrivé très prématuré, et ayant contracté la jaunisse et la coqueluche. J'ai des bribes de voyages en train pour aller le voir et lui apporter du lait maternel. Ma mère se "trayait" avec une machine pour le lui apporter. Je me souviens du jour où on est allé le chercher à la maternité, c'était une surprise, il aurait du rester encore un peu.  Nous sommes rentrés en en train, nous n'avions pas les moyens d'avoir une voiture, ni de payer un taxi.

Par contre, je me souviens très bien de la naissance de ma sœur.
 
J'allais avoir 9 ans, nous étions le 20 juillet 1976.

Ma mère a fait le ménage en grand. Il parait que c'est le syndrome du nid. Je ne sais pas si cela existe vraiment ou si ce n’est pas le ménage qui a déclenché l’accouchement ! Mon père est comme d'habitude sur les routes de France. Le soir, une fois mes frères couchés, nous jouons au rami avec la radio pour seule compagnie car la télé en noir et blanc, venait de rendre l'âme. L'appartement est propre et bien rangé, je n'ai pas l'habitude. Tout à coup, ma mère se lève, se plie en deux autant que lui permet son gros ventre. Cela passe. Elle se rassit. Nous nous couchons après quelques parties.

Ma mère me réveille en plein milieu de la nuit. Elle va accoucher et elle a appelé une ambulance. A travers, les brumes du sommeil je l’entends dire des phrases que je ne comprends pas, « j’ai perdu des os ». Je retiens que je dois appeler, au matin, le magasin où ma grand-mère allait tous les jours chercher son journal et ses cigarettes. En 1976, tout le monde n’avait pas de téléphone fixe et le portable n’existait pas.

L’ambulance vient la chercher.

Je suis seul dans l’appartement, mes deux petits frères dorment sagement dans leur chambre, ils n’ont pas été réveillés. J'ai encore le privilège d'avoir ma chambre seul.  J’ai peur. J’appelle le magasin. Personne ne répond à 5 h du matin et les répondeurs sont rares. Je me couche dans le lit de ma mère, je sens encore sa chaleur protectrice. Je ne m’endors pas vraiment, guettant, inquiet, chaque bruit de la tour d’HLM dans laquelle nous vivions.

A 8h, on sonne. Les enfants que ma mère garde viennent d’arriver. Leurs parents sont venus les déposer au pied de l'immeuble, ils sont déjà repartis. Je les fais rentrer en expliquant ce qu'il se passe. Ma grand-mère devrait arriver, bientôt. enfin j'espère. Je fais le petit déjeuner pour mes deux petits frères.

J’appelle le magasin. La dame est gentille et transmettra le message à ma grand-mère dès qu’elle passera.

Je m’occupe des uns et des autres, sans trop de heurs.

A midi, je n’ai toujours pas de nouvelles de ma mère ni de ma grand-mère. Les petits ont faim. Je prépare la seule cuisine que je sais faire à 9 ans : des steack hachés et des pâtes. Ca m’occupe l’esprit et les mains. Mes frères et les deux enfants que ma mère garde sont bien sages.

Vers 13h00, quand ma grand-mère arrive finalement, elle trouve tout le monde attablé. Pour une fois, elle avait fait la grasse matinée, elle n’avait eu le message que très tard. C'est bien notre chance.

Je suis soulagé. Ma mère va bien, ma grand-mère m’apprend que nous avons une petite sœur, un espoir inattendu réalisé.

Ayant eu des problèmes pour mener à bien sa grossesse, ce sera la dernière, une opération mettra définitivement l'utérus de ma mère à l'abri.

Après avoir écrit ce texte, je me suis rendu compte à quel point nous étions isolé. Il me parait symptomatique que le seul numéro que ma mère ait donné soit celui pour joindre ma grand-mère. Cette histoire est datée, il est évident qu'aujourd'hui à l'heure des portables, tout aurait été différent.

Elle est très représentative de ce que fut mon enfance : âpre sans être difficile, sans père réellement présent, les week-end étaient consacrés au rugby, sans amis, avec une famille éparpillée ... Une grande autonomie m'était nécessaire pour tenir 4 mouflets affamés.

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Commentaires
C
j'ai écrit tellement vite que j'ai fait plein de fautes de frappe...désolée...<br /> bonne journée et encore merci
C
Je veins de lire ton mail avec tes réponses si bien détaillées. Je t'en remercie, ce que tu as écrit m'est précieux et instructif...<br /> Je veins de lire cette note...elle me touche fort.<br /> Non seulement ut récontes vraiment bien, mais ce que tu racontes est "émouvant"<br /> Tu as dû passer par des moments pas faciles...je t'admire
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