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Farfalino
20 mars 2007

Résolution

« Il faut que je vous dise... j'ai menti! » Les cuillères restent en l’air, les bouches sont ouvertes, ils sont tous suspendus à mes lèvres. Même la télé s’est mise en sourdine. Douze yeux, six paires, me regardent surpris, l’éclat de rire de la blague de tonton René coincé dans la gorge. Elle était pourtant très drôle, c'est l'histoire d'un couple de pédés qui tire au sort celui qui allait se faire enculer.

« Je n’ai pas de fiancée, je n’aime pas les femmes, je préfère les garçons, je suis homo ». Je me rassis, certain de mon petit effet et pioche dans ma part de forêt noire. Je ne les regarde pas. Le plus dur est fait, j’ai sauté dans le vide, mon parachute s’appelle Philippe, je l’aime. La chantilly est bonne.

J’ai fait plusieurs fois le tour du lac pour prendre ma décision, trouver le courage et sortir de mon placard jusqu’alors fermé à double tour. C’est le bon dimanche, le bon moment. J’ai saisi la blague au bond.

Mon père se lève et s’approche de moi. Il met ses mains sur mes épaules, m’enlace et m’embrasse sur la joue. « Tu restes mon fils ». Tata Gabrielle dit que je leur ai fait peur et que j’aurais pu leur annoncer un cancer ou un renvoi du lycée. Tout le monde se gondole. « C’est moins grave que de se casser une jambe ! ».

Mon père se lève et s’approche de moi. Je le regarde, son visage est impassible. Il me retourne une paire de claques. Ma tête cogne contre le mur. « Hors de ma vue, pédé, tarlouze, pédale, lopette, tu n’es plus mon fils, va te faire défoncer le cul ailleurs ». Il me tire par l’épaule, je tombe de ma chaise et me jette hors de la pièce. J’ai le nez en sang.

Le lac est vert, tranquille, sauvage. J’en ai fait plusieurs fois le tour pour prendre ma décision. Les rires gras et avinés font voler en éclats ma résolution. Cette blague est presque drôle. Ce n’est pas le moment, je le dirais plus tard, dimanche prochain, ou un autre jour, … jamais ! Je me dépêche de finir ma forêt noire pour empêcher les mots de sortir. La chantilly est vraiment très bonne.

Second texte sur la consigne 42. Comme j'avais déjà fait un texte un peu similaire avec "Monsieur De", je n'ai pas voulu envoyer celui-ci.

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