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Farfalino
26 avril 2006

Je n'irais pas à son enterrement de vie de garçon

J'avais rejoint mon compagnon à la gare du nord, après une journée de travail à la capitale. Nous avions pris nos places pour rentrer chez nous quand nous fûmes hélés par un de mes chefs qui revenait par le même train. Après un rapide salut, il m'annonça que lui et Lolo, sa compagne de qui il s'était séparé quelques mois auparavant, allaient se marier ! Les bras m'en sont tombés alors que le coup de sifflet furibard du chef de quai nous pressait de monter dans le TGV.

Je dis mon chef mais en fait il a été mon ami.

Je l'ai rencontré lors de ma seconde première année de DEUG. Tous mes copains de ma première première année avec qui j''avais surtout appris à jouer au tarot, s'étaient éparpillés dans la nature, je me retrouvais donc seul parmi tous ces anciens lycéens aussi perdus que moi. Les amitiés dans ces cas là se forment au hasard du placement dans l'amphithéâtre. Comme il fallait former des binômes (tiens ça me rappelle quelque chose !) et que nous avions sympathisé pendant les premiers cours et le premier repas, nous avons passé la majeure partie de la vie universitaire ensemble. Je l'ai même initié au jeu de rôle avec une partie resté sans lendemain. Puis, déjà un peu séparé à cause d'options différentes dans la seconde partie de l'année, je le perdis de vue. Il resta à refaire son second semestre alors que moi je commençais ma première seconde année de DEUG.

Je terminai brillamment mon DEUG avec une mention inutile, en quatre ans au lieu de deux. Il ne s'était pas passé grand chose dans ma vie. Enfin rien dont je me souvienne, sinon d'étés ennuyeux à garder l'appartement et les chats, et des cours de mathématique au quatre coins de la métropole lilloise. Je m'étais impliqué dans un club de jeux de rôle, j'avais redoublé à cause d'un malentendu et j'ai eu une déception amoureuse avec une fille (bah oui ça arrive).

Le jour de la rentrée de licence d'informatique, je le vois assis sur les marches du bâtiment de mathématiques, seul, attendant l'heure de la première réunion. On se salue, on se donne des nouvelles, on parle rapidement des deux années qui venaient de s'écouler. Lui avait terminé son DEUG en février (une véritable aberration du système de l'époque), et il avait travaillé au service informatique de l'établissement médical de son frère pour faire la jonction avec le début de la licence. Reprendre la vie estudiantine après 9 mois de travail lui parut étrange, un rien décalé. Nous avons reconstitué le binôme et il s'est inscrit au club de jeu de rôles. Alors, il a fait partie de ma vie hors université ...

Je n'ai jamais été vraiment amoureux de lui. Enfin pas plus que le moindre garçon un peu regardable et drôle qui croisait ma vie. Je me souviens d'un moment très précis de cette période. Alors que nous étions compressés dans la cohue habituelle pour se rendre au restaurant universitaire, je ne sais plus pourquoi, nous avons parlé des homos. Alors que j'étais contre lui, à cause de la marée humaine, il me déclara tout de go et droit dans les yeux, "qu'il y avait des homos chez qui cela ne se voyait pas". J'ai cru défaillir car, à l'époque, personne ne savait et personne ne devait savoir.

Nous avons fait du jeu de rôles, nous avons fait notre licence et notre maîtrise, nous avons partagé des films, de la musique, il pianote un peu les synthés et chante assez bien quand il s'en donne la peine, et moi je m'étais toqué d'apprendre à jouer de la guitare. Avec certains membres du club de jeu de rôles, plus tard, nous avons passé par 2 fois nos vacances en Italie, dans ma famille, et avec un troisième larron (de qui j'ai été profondément amoureux cette fois), nous sommes allés 5 semaines aux Etats-Unis.

En maitrise, il rencontra ceux qui allaient devenir ses associés. Je n'avais pas particulièrement de sympathie pour eux, mais lui, il a commencé à sortir avec eux et à les voir souvent (cela me rappelle quelques vers de la chanson "ton autre chemin" de JJ Goldman). A l'issu de cette année-là, nous avons fait un stage à la caisse d'Epargne pendant 3 mois, et bien payés pour l'époque. Puis, comme j'en avais assez de la fac et que l'opportunité s'est présentée, je suis resté chez les écureuils, pendant plus de 4 ans. J'y appris mon métier, la rigueur et la méthode, et aussi le pragmatisme.

Lui il a fait son DESS puis son armée, avec beaucoup de chance, il s'est retrouvé formateur pas très loin de chez lui, ce qui lui a permis d'aider à monter le projet de création d'entreprise tandis que les deux autres faisaient un autre DESS où ils rencontrèrent le 4ième associé de la future boite.

Après le séjour aux Etats-Unis, je le vis un peu moins souvent. La création de la boite prenait beaucoup de temps et d'énergie. Les sorties aussi. Deux ans après, il ne faisait quasiment plus de jeux de rôle, moi non plus ayant subit un revers de fortune avec un tournoi qui ne tint pas ses promesses. De plus, je n'arrivais plus à écrire de scénarios, mon énergie se dissolvant dans mon travail.

Et puis, il vint me voir pour me débaucher. Il m'apprit également qu'il y avait une "Laurence" dans sa vie. J'entrai donc avec joie dans une jeune pousse technologiquement avancée. Le jour de mon pot d'arrivée, lui et "Lolo" annoncèrent, après 2 mois de vie commune, qu'elle était enceinte ... de jumeaux !

Au bout de trois mois, je me rendis compte de mon erreur. Certes  j'y suis encore, cela va faire 11 ans. Quand nous étions à la fac, nous étions sur un plan d'égalité, j'étais même meilleur que lui, alors quand on s'engueulait, je pouvais avoir le dessus. Mais après ... Il était le chef ! Alors cela a bardé, surtout que moi je mélangeais tout, je m'enfonçais toujours un peu plus dans la dépression, dans le dégoût de soi, de la société et j'avais sous-estimé l'investissement nécessaire dans une boite encore jeune.

J'avais "honte" et je ne voulais pas révéler mon orientation sexuelle à cette bande d'hétérosexistes. Je coupai les ponts progressivement avec tous ceux et toutes celles qui me connaissaient "avant". Nous avons cessé progressivement de se voir en dehors et lui a été emmené dans le tourbillon de la parenté. Il l'apprit fortuitement par le père de 3 des enfants de la photo d'un billet récent. Le dernier bastion tomba et j'amenai à une de ses soirées mon compagnon actuel.

Aujourd'hui nous avons des relations cordiales, et nous ne travaillons pas directement ensemble. Nous nous voyons en dehors de la boite une fois par an avec les anciens "seigneurs".

Il y a 15 jours, on me demanda de participer à son enterrement de vie de garçon. N'étant pas un fêtard, une sorte de triste gay, et n'ayant aucun goût pour les blagues de potache hétéro beauf, j'ai décliné l'invitation car je ne me sentirais pas à ma place. Et pourtant, j'aurais tellement voulu être normal ! De toute façon, je n'ai jamais trop aimé les mélanges vie professionnelle et personnelle. La plupart des amis que j'ai le sont devenus qu'après être partis de la boite.

Mais je serais à leur mariage, avec mon compagnon, et les anciens "seigneurs". J'espère bien en profiter car ce serait sans doute le meilleur cadeau à lui faire.

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Commentaires
F
les blagues de potache hétéro beauf<br /> <br /> J'en connais un qui n'a pas participé à l'enterrement de sa propre vie de garçon.<br /> Ses copains sont rentrés à 5H du mat. Ils ont fait les potaches sans le principal intéressé.
F
'tain c'est long !
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